Pour pallier les déserts médicaux, la télémédecine est-elle une solution ? Et le pharmacien dans tout ça ?
Nous aurions aimé écrire l’adjectif « Magnifique » à l’annonce de l’augmentation du numerus clausus faite par la ministre de la Santé Marisol Touraine le jeudi 24 novembre à l’Assemblée nationale, lors du débat sur la proposition de loi Union des démocrates et indépendants (UDI) pour un « accès aux soins égal sur l’ensemble du territoire ».
Magnifique, parce qu’on imagine que l’on va enfin s’intéresser sérieusement à la très grande problématique des déserts médicaux.
En effet, pas besoin de tableaux Excel, d’histogrammes et données en tout genre pour s’apercevoir que les médecins de campagne et pas seulement se raréfient et qu’il est plus qu’urgent de résorber ce problème. Car oui, c’est un problème !
Cela ne touche pas seulement les patients qui doivent parcourir des kilomètres à la recherche d’un médecin, mais parce que cela atteint tout un pan de l’économie locale.
En effet, lorsqu’une ville voit diminuer son nombre de praticiens, de nombreux acteurs sont impactés.
Le pharmacien, première victime des déserts médicaux ?
Le premier et non des moindres, c’est le pharmacien. Et pourtant, ce dernier est le premier professionnel de santé sur le terrain. Pas moins de 4 millions de patients entrent dans une officine par jour en France. Il est force de conseils, d’écoute et d’empathie. Il connaît ses patients, leurs vies, les us et coutumes de chacun. Mais, c’est aussi un acteur de la vie commerçante.
Certes c’est un professionnel adossé au Ministère de la Santé mais son officine à des vitrines et comme tout “commerce”, des entrées et des sorties de clients. De plus, il est le parfait représentant du maillage des professionnels la santé. Mais, l’officine n’est pas la seule impliquée par la diminution des médecins de ville à taille humaine. Par effet de boule de neige, c’est le tissu économique de la ville qui en ressent les conséquences. Quand un patient se rend dans une officine, il en profite pour visiter d’autres points de vente de la commune. Cela participe à la vie économique et sociale d’une ville.
Donc, oui augmenter le numerus clausus et une bonne chose, mais cette augmentation arrive bien tardivement. Le mal est déjà là, il n’y a de moins en moins de médecins dans les zones rurales
Pour pallier ce phénomène, il existe des actions qui ne sont certes pas des solutions à long terme, mais des palliatifs permettant de maintenir un certain maillage de santé publique.
La télémédecine.
La télémédecine, une pratique avant tout
D’un point de vue cartésien, posons-nous d’abord la question de la définition de la télémédecine. Selon la définition de l’ARS :
“La télémédecine est une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication. Elle met en rapport, entre eux ou avec un patient, un ou plusieurs professionnels de santé, parmi lesquels figure nécessairement un professionnel médical et, le cas échéant, d’autres professionnels apportant leurs soins au patient. Elle permet d’établir un diagnostic, d’assurer, pour un patient à risque, un suivi à visée préventive ou un suivi post-thérapeutique, de requérir un avis spécialisé, de préparer une décision thérapeutique, de prescrire des produits, de prescrire ou de réaliser des prestations ou des actes, ou d’effectuer une surveillance de l’état des patients. »
La télémédecine est donc d’abord une pratique médicale, et non pas un système technologique. Sur ce secteur d’activités, on voit apparaître quelques acteurs comme la société Huawei ou H4D.
La solution de télémédecine de la société chinoise permet des consultations de spécialistes à distance. Des patients peuvent rencontrer des spécialistes et autres professionnels de la médecine.
Le système de télémédecine connecte docteurs et patients via les réseaux existants. Ils peuvent converser en vidéo et audio HD, comme s’ils se trouvaient dans la même pièce. Les patients peuvent montrer leurs symptômes ou évoquer leurs préoccupations en temps réel.
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Ainsi,une pharmacie à Commequiers en Vendée a choisi d’installer une station de télémédecine avec des objets connectés au sein de son officine. Deux fois par semaine, des consultations d’ophtalmologistes et dermatologues ont lieu, pour le plus grand plaisir des patients qui n’ont plus à attendre des mois un rendez-vous. L’autre solution permettant un accès plus facile de la médecine vers les populations, c’est un médecin lui-même qui l’a créé.
Il s’agit de la société H4D. De façon assez similaire que pour Huawei, un médecin mène une consultation et guide son patient en visioconférence. Il demande au patient de mesurer son IMC, sa température, son taux saturation et toutes les données de santé. Pour affiner son diagnostic, il peut réaliser les prises de paramètres physiologiques et examens médicaux qu’il juge nécessaires.
Le médecin n’est pas la cible à abattre
Ces solutions ne remplacent en aucun cas les médecins et ce n’est pas le but. En effet, rien de tel qu’un véritable échange en face à face, avec l’attention et l’empathie dont savent faire preuve les médecins envers leurs patients. Ces solutions de télémédecine permettent de « soulager la charge des généralistes, mais sur un parcours de soins donné, et selon un protocole de surveillance bien cadré » comme l’indique l’ordre des médecins dans une interview au Moniteur des Pharmaciens.
La population française vieillit, les médecins se raréfient et nos campagnes deviennent de vrais déserts médicaux entraînant avec eux une baisse de l’activité économique. Alors, pourquoi ne pas essayer de développer ces systèmes qui peuvent être perçus comme sauveurs pour certains ou moindre mal pour d’autres. En tout cas, ils existent et il ne faut pas les négliger.