Dans l'édition 2015 de son rapport d'étude Global Innovation 1000, le cabinet de conseil et d'audit Strategy&, l'entité conseil du groupe PwC, publie les chiffres des politiques de Recherche & Développement des plus grands groupes mondiaux et de l'attractivité des pays en matière d'innovation, répertoriés dans un classement général. Voici les principales conclusions à comprendre de l'étude.
Éminent membre du Big Four, appellation englobant les quatre plus grands cabinets d'audit et de conseil à travers le monde, PriceWatersonhouseCoopers, désormais PwC, publie un nouveau rapport particulièrement détaillé. Celui-ci décrit les tendances générales en termes de Recherche et Développement via l'étude des 1 000 entreprises cotées en bourse dont le budget R&D a été le plus important au cours de l'année 2015, et cela à travers le monde. Où se situent les investisseurs les plus actifs ? Quelles sont les régions du globe les plus attractives ? Quelles sont les entreprises les plus innovantes ? Nous vous donnons ici les principaux éléments de réponses.
Reprise et changement de polarité pour la Recherche et Développement
680 milliards de dollars : voici la portée globale de l'investissement entrepreneurial pour l'année 2015 à l'échelle mondiale en faveur de la Recherche et Développement. Après une période de marasme économique, le goût d'amertume laissé par la crise financière de 2008 semble désormais s'estomper. Selon le rapport « Global Innovation 1000 », cette somme est directement impactée par une hausse de 5,1 % de celle-ci, soit sa plus forte augmentation annuelle depuis les trois dernières années, avec un taux de croissance sur 10 ans de 5,4 %.
Les entreprises réinvestissent, mais où ? Car si la course à l'innovation reprend lentement ses droits après le traumatisme des Subprimes, la donne a changé au sein de la géographie d'investissement stratégique : l'Europe, place forte incontestable de l'exercice jusqu'en 2007, a finalement cédé son leadership au profit de l'Asie, qui s'impose sans réelle surprise comme la nouvelle destination favorite des entreprises pour les investissements en R&D.
Le continent asiatique a en effet capitalisé sur son aura d'attractivité pour les différentes firmes du monde entier. Et cela est essentiellement incarnée par les géants économiques que sont la Chine et l'Inde, drainant à eux seuls une grande majorité de l'ensemble des investissements extérieurs, en particulier pour les entreprises américaines. Avec d'autres atouts non négligeables tels que la proximité des marchés à forte croissance, des grands sites industriels, celle des fournisseurs stratégiques, ainsi que des coûts de développement moins élevés, c'est tout naturellement que l'Asie s'empare de la première place. En particulier avec une augmentation des dépenses R&D importées de près de 195 % pour ses deux plus grandes économies.
« L'Europe est passée du statut de première destination mondiale pour les investissement R&D des entreprises à la troisième place, derrière l'Asie et l'Amérique du Nord. L'Europe se vide de ses capacités. La forte croissance des dépenses en Recherche et Développement exportées vers d'autres pays, en particulier par la France et l'Allemagne, sont des facteurs clés dans ce renversement. », Barry Jaruzelski, responsable de l'étude pour Strategy&.
Alors que l'Europe se vide de ses capacités, les États-Unis demeurent sur une constante stable, notamment en conservant son statut de plus gros investisseur sur la scène internationale. Avec près de 145 milliards de dollars d'actifs injectés dans la Recherche et Développement, il s'agit d'une hausse de 34% depuis 2007, dont 121 milliards exclusivement pour le continent asiatique. Mais aussi en demeurant une place sûre pour l'investissement, avec un total de 53 milliards de dépenses importées aux États-Unis, soit également une hausse de 23 % depuis 2007. Impossible cependant de ne pas constater l'effritement progressif de l'avance américaine sur les autres pays développés : si son concurrent chinois par exemple n'accordait que 23 % du total américain en dépenses pour la R&D en 2007, celui-ci alloue désormais en 2015 près de 38 % en investissement.
« Malgré ce phénomène, les Etats-Unis restent le plus grand marché mondial. Les entreprises les considèrent comme un marché attractif qui offre une main-d'œuvre compétente, une culture propice à l'innovation et un environnement économique flexible en dépit de coûts plus élevés. Les États-Unis disposent également d'une bonne accessibilité aux marchés stratégiques, un facteur d'attractivité évident pour les entreprises étrangères désireuses d'exporter leurs fonctions R&D, la Silicon Valley exerçant en particulier une puissante attraction. », Barry Jaruzelski, responsable de l'étude pour Strategy&.
R&D : les principaux acteurs
La mondialisation de l'activité R&D devient la norme (94 % des entreprises ont une activité R&D en dehors de leur pays d'origine) et cela bénéficie aux entreprises. Cela suggère que l'exportation des activités R&D présente des avantages substantiels et que les multinationales ont les moyens de coordonner ces activités entre de nombreux sites à travers le monde. Les entreprises semblent par ailleurs tirer parti d'une présence mondiale diversifiée. Les responsables R&D, sollicités dans le cadre de l'étude, citent l'accès aux talents (71 %), la proximité des clients (68 %) et la compréhension des besoins spécifiques aux marchés locaux (64 %) parmi les facteurs déterminants dans le choix de l'implantation des activités R&D.
Au niveau même du marché, trois secteurs obtiennent les faveurs d'une majorité des dépenses allouées à la R&D : sans surprise, c'est les domaines à forte valeur ajoutée que sont l'informatique et l'électronique, l'automobile et la santé. Ce dernier secteur présente même une tendance favorable qui, à terme, devrait en faire le premier domaine d'activité au niveau des dépenses de R&D à l'horizon 2019. Au pied du podium, la valeur montante du segment des logiciels et d'Internet obtient le taux de croissance le plus important entre 2014 et 2015 avec une hausse de près de 27 % et devient donc le quatrième secteur le plus attractif pour les dépenses en R&D sur l'année 2015.
« Il n'est pas surprenant de constater que le secteur logiciels et d'Internet dépasse celui des produits industriels en termes de dépenses R&D. Ce constat constitue toutefois un jalon important, dans la mesure où il illustre bien comment les logiciels et la nouvelle économie sont en train de se substituer aux activités traditionnelles. », Barry Jaruzelski, responsable de l'étude pour Strategy&.
Le constat est donc fait. C'est donc tout naturellement que sur la tête de liste des entreprises investissant le plus dans la R&D figurent Volkswagen, Samsung et Intel, avec à noter une remontée fulgurante d'Apple dans ce Top 20. Aucun doute que l‘impact du marché embryonnaire de la voiture autonome y est pour quelque chose, puisque Apple est sur la première place du podium des entreprises les plus innovantes en 2015, devant Google et Tesla, eux aussi dans la course pour le lancement de leurs modèles de voitures autonomes.
Le cas français
L'année 2015 marque l'accroissement du retard français en la matière. Parmi les entreprises les plus influentes au sein du classement général établit par le rapport, les entreprises de l'Hexagone ne représentent que 5,2 % du total des dépenses pour la R&D.
En effet, l'analyse retranscrite dans le rapport est sans appel : les dépenses associées à la R&D par les entreprises françaises sont largement en deçà de celle de leurs homologues européennes, et cela malgré une tendance à l'accroissement depuis 2005. Dans les mêmes conditions, on observe également un recul inédit des dépenses pour la R&D au sein des sociétés françaises de 1,5 %, bien à contre-courant de la tendance européenne qui enregistre une hausse globale de 6 % pour l'année de 2015.
En dépit de ses meilleurs élèves dans l'exercice incarnés entre autres par Dassault Systèmes, Saint-Gobain, Air liquide et Danone, mais surtout par Sanofi qui est la seule entité française à intégrer le Top 20 mondial du « Global Innovation 1000 », les résultats globaux de l'entrepreneuriat français sont particulièrement négatifs : entre 2007 et 2015, la France a vu chuter ses dépenses d'innovation de 21% et a été rétrogradée du 6ème au 7ème rang des pays investissant le plus en Recherche et Développement.
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